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La disparition récente de Manoel de OLIVEIRA a ramené à la surface tant et tant de souvenirs, que le besoin d’évoquer deux des personnes les plus intéressantes, les plus créatives que la vie m’a permis d’approcher, s’imposa.
Quoiqu’ aucun lien de parenté proche ne me relie à eux, ce BLOG, destiné à la parentèle au sens très large, se prêtera à la confession.
Au cours des années 1953, 54, 55 et 56, à PORTO, j’ai eu le bonheur de bien connaître Antònio PEDRO et Manoel de OLIVEIRA.
Leur fréquentation me prouva une fois encore combien les vrais « grands Hommes », dont les Artistes incarnent pour moi la quintessence, sont d’une simplicité et dans le cas de ces deux-là, d’une gentillesse qui m’étonne et étonnera toujours.
Pour aider à les situer, il suffit de dire que Manoel de OLIVEIRA, né en 1908, est considéré par les historiens du Cinéma comme l’initiateur du Néo-Realisme, avec son film « ANIKI-BOBO », sorti en 1942.
Les italiens, avec « ROME, Ville Ouverte » de ROSSELLINI, sont venus après, en 1945.
Quant à l’oeuvre d’Antònio PEDRO, né en 1909, elle est multiforme : peinture, céramique, journalisme, écriture, Théatre.
Le hasard fit qu’ils furent condisciples chez les Jésuites à LA GUARDIA, en Galice, ESPAGNE.
Pourquoi la Galice ? Parce qu’en 1910, la République portugaise naissante avait expulsé tous les Ordres Religieux, traditionnellement chargés de l’Instruction et éducation des jeunes gens.
Ma Maman, née en 1906, a été élevée chez les Franciscaines de TUY, en Galice, elle aussi.
Quand je l’ai connu, Antònio PEDRO avait déjà beaucoup voyagé, séjourné des années à Paris et à Londres.
Pendant le séjour à Paris, il fréquenta les cercles surréalistes et en 1934 on le trouve en très bonne compagnie dans l’Histoire de l‘Art, puisqu’il est signataire parmi d’autres du « Manifeste Dimensioniste ». Quelques uns des signataires : Alexander CALDER, Joan MIRO, Antònio PEDRO, Hans ARP, Robert et Sonia DELAUNAY, Marcel DUCHAMP, Wassily KANDINSKY, et Francis PICABIA, dont il fut très proche.
A Londres, pendant les années de Guerre, il fut « speaker » à la B.B.C.
Revenu à Lisbonne tout de suite après la Guerre, il participe et organise deux expositions Surréalistes en 1947 et 1949. Mais, sa passion pour le théâtre, le taraude et l’amène à créer une troupe. Sa grande culture le rendait très exigeant sur le choix des textes. On était loin du Boulevard et des caleçonnades.
Mais le microcosme culturel « lisboeta » n’était pas encore prêt à accueillir PIRANDELLO ou BRECHT. Au Théatre National D. Maria II, l’équivalent de la Comédie Française, on n’abordait que le classicisme le plus orthodoxe.
J’ai toutefois le souvenir vers 1942, de deux ou trois soirées de suite, où mon oncle et ma tante avaient assisté à un évènement théâtral qui fit grand bruit. Il s’agissait de la pièce d’Eugène O’NEILL « Mourning becomes Electra ». J’avais douze ans et je n’avais pas pu y aller.
Mais le théâtre social, lui, était proscrit.
Et la PIDE, la police politique de Salazar, par la Censure, les rumeurs, les chicaneries administratives, la crainte diffuse, faisait tout son possible pour mettre des « bâtons dans les roues ». Totalement dégoûté, PEDRO se retira à MOLEDO, petite plage du nord du Portugal, presque en face de LA GUARDIA justement. La céramique va l’occuper. Comme tout créateur, il écrit, il écrit toujours. Dona Manuela, sa charmante épouse protège l’intimité du couple, éloignant les intrus.
C’est à MOLEDO que le grand poète Eugénio de ANDRADE, qui le connaissait, et l’avocat Alexandre BABO, opposant notoire au fascisme, sont venus le prier de prendre la direction artistique du T.E.P.
Le Teatro Exprimental do Porto ( T.E.P.) émanation du CIRCULO de CULTURA TEATRAL était porteur d’un projet culturel en tous points semblable à celui qui avait échoué à Lisbonne.
Il a beaucoup hésité, beaucoup tergiversé, mais la tentation était si forte et l’enthousiasme du petit groupe dont je faisais partie, sous le nom de Natércia PIMENTEL, était si grand, qu’il finit par céder. Toutes les semaines nous nous réunissions dans une salle prêtée par un éditeur. Des lectures, des exercices de respiration et de position de la voix, des expressions corporelles, des poésies, toutes les théories de Stanislawsky étaient mises en pratique.
C’était quelque chose qui ressemblait au travail de l’Actor’s Studio.
Antonio PEDRO était d’une taille impressionnante, dans ma mémoire plus de deux mètres. Il était peu disert, ne donnant que les indications de « départ ».
Les premières séances m’ont laissé des souvenirs très mitigés, je le trouvais distant, froid. Jusqu’au jour… mais là, il faut tout dire.
Mon premier mari, Alfredo PIMENTEL, était très influencé par « l’american way of life ». Tout ce qui venait des E.U. le passionnait, la musique, l’architecture, la littérature, le cinéma bien sûr. Il avait trouvé, sur le port de LEIXOES, le grand port de PORTO, un commissionnaire.
Contre un petit pourcentage, ce marin transatlantique, lui procurait les derniers disques, les livres tout juste édités, ses cigarettes favorites, etc. Dès notre mariage, j’ai bénéficié de ce petit trafic. J’ai eu des Polaroid, avant les autres, des bas nylon autant que je voulais, des jeans Levi Strauss , des Converse, et surtout des maillots de bain « Cole of California » de toute beauté. Dans une de ces livraisons, il y avait une casquette de baseball bleu marine.
Cette casquette m’allait très bien, et, sans me poser la moindre question, le premier soir de travail qui suivit, j’y suis allée en jeans et casquette. Mon aplomb a du amuser Antonio PEDRO. Les choses ne se passaient pas comme d’habitude, quelque chose le turlupinait, et tout d’un coup, il se lève, vient vers moi : » Oh Natércia, que linda casquette ! Empresta-ma para eu ir dar uma voltinha ?
« Natércia, quelle belle casquette ! Voulez-vous me la prêter pour aller faire un petit tour avec ? »
C’était exactement comme s’il m’empruntait un joli vélo, pour aller faire un petit tour. Hilarité générale ! Il pose la casquette sur le haut du crâne et esquisse quelques pas maniérés.
A partir de ce soir là, ma relation avec lui fut empreinte d’une presque tendresse. Je ressentais son affection, et cela a rendu d’autant plus difficile mon départ, qu’il a vécu comme une trahison.
La preuve par l’image
Le 18 juin 1953, au Théatre SA da BANDEIRA, fut notre grand jour. Ce fut un triomphe.
PORTO, ville historiquement portée à la contestation de l’ordre établi, y compris par les armes, attendait avec curiosité. Cette troupe d’amateurs composée surtout d’opposants politiques, d’intellectuels, d’artistes passés par la case prison pour trois ou quatre d’entre eux, osait mettre en scène trois petites pièces, « La goutte de miel » de Léon Chancerel, « A nau Catrineta » du poète E. Gonçalves et « Une demande en mariage » d’ A. Tchekov. Je figurais comme la 2ème demoiselle dans la « Nau Catrineta », et quel travail avais-je donné aux costumières pour cacher une grossesse de 5 mois !
Le spectacle était passé sous les fourches caudines de la PIDE, ce qui ne fut pas le cas pour « Mère Courage », traduite de l’allemand par notre amie Ilse Losa, et aussitôt interdite. Mais PORTO attendait la subversion par le théâtre, attendait plus fort et Antònio PEDRO voulait frapper un grand coup. Par le Théâtre, PORTO voulait s’opposer, résister à ce régime fasciste aux griffes rognées, mas encore capables de faire du mal. Faisant appel à tout son savoir, à tout son art du double-jeu, de la métaphore, de l’ironie acérée, il se mit au travail sur la tragédie des tragédies, « l’ANTIGONE » de SOPHOCLE. Il en tira une glose, hors du temps peut-on-dire, où des personnages inventés par lui nous ramenaient tantôt à la Grèce antique, tantôt au monde contemporain.
Programme « Teatro SA da Bandeira »
Programme Antigona
Sur INTERNET il suffit de demander «Antònio PEDRO», « la glose d’Antònio PEDRO sur ANTIGONE », « Antònio PEDRO et le T.E.P. » et tant d’autres, pour constater que son oeuvre continue à alimenter la réfléxion.
Soixante ans après, des universitaires, des exégètes travaillent toujours sur sa glose.
Son caractère de résistance, d’opposition à l’ordre injuste nous interpelle toujours.
Car « il est encore fécond le ventre d’où a surgi la Bête immonde ».
Il faut avoir vécu sous un fascisme, soft ou hard, pour comprendre ce besoin inassouvi de revisiter le passé, de l’interroger et d’en tirer des leçons pour l’avenir.
Le rôle de l’ENCENADOR (Metteur-en-scène), primitivement écrit pour lui-même, A. PEDRO, et finalement interprété par le poète Vasco de LIMA COUTO et le rôle d’ ARTEMISIA qui me fut attribué, ne figurent pas dans la tragédie de SOPHOCLE.
Antònio PEDRO a écrit pour moi ce rôle d’ ARTEMISIA, petite soubrette espiègle, et me répondit-il un jour, symbole de la « beauté éternelle, intemporelle » et « de la jeunesse qui peut tout oser ». Cela ne me fit pas tourner la tête, heureusement. Par l’invention de ces deux personnages, A. PEDRO, apporte à toute l’oeuvre, justement, une intemporalité qui, à travers l’ironie, les « lieux-communs », ou les plaisanteries presque triviales, font passer un message politique à peine voilé.
Les 3 VIEUX (os três Velhos) représentent le Choeur Antique.
Le deuxième VELHO avait très peu de mots à dire, mais ces mots devaient sonner étrangement aux « Grandes Oreilles ». L’interprète en était l’avocat et dramaturge, Alexandre BABO, qui était le défenseur habituel des prisonniers politiques.Il était une des figures les plus marquantes dans l’opposition au fascisme salazariste. Nous vivions tous les deux à l’époque une folle passion amoureuse. Une passion qui entre autres évènements contribua à mon départ vers la France. Or le hasard a voulu que, étudiante à la Sorbonne, j’y rencontre mon second mari, Pierre LAFORIE. Et que j’entame auprès de lui et de nos deux filles, la deuxième partie de ma vie, la partie française.
CREON fut joué par João GUEDES, trop tôt disparu, et, devenu dans les années qui ont suivi, comme Dalila ROCHA, un très grand acteur reconnu.
Quelle émotion m’envahit en remémorant ce 18 février 1954 ! Le lendemain j’allais fêter mes 24 ans. Nous avions bien conscience de participer à quelque chose de « grand », mais pas à ce point.
Ce fut historique !
La dernière scène d’ARTEMISIA, témoin et « acteur » de la tragédie, reculant en proie à la terreur, après avoir constaté que HEMON avait préféré accompagner sa fiancée ANTIGONE dans la mort, m’a laissé une interrogation à jamais sans réponse…
Je recule effrayée, mes mains ensanglantées par le poignard qui tua HEMON me font peur, le public applaudit à tout rompre, je vais jusqu’aux coulisses … et là, avant que je reprenne contact avec la réalité, encore dans un état second, Antonio PEDRO ou Alexandre BABO (lequel des deux ?)me prend les deux mains et les embrasse longuement, longuement …
Le rôle-titre, ANTIGONA, fut attribué à Dalila ROCHA. Elle, une femme mûre de plus de trente ans, était vraiment une ACTRICE. Quelqu’un pour qui la vie était le Théâtre. Sa carrière se poursuivit à LISBONNE jusqu’au Théâtre National D. Maria II. Je n’étais moi, qu’une jeunesse qui rêvait d’être applaudie sur un plateau. Ma vraie vie était ailleurs.
Pourtant Antònio PEDRO me croyait capable de grandes choses et me harcela presque, quand j’ai choisi de venir vivre en FRANCE. Par des visites à mes parents, à Monção, par des lettres, pendant des mois, presque pendant deux ans, il tenta de me convaincre de devenir actrice professionnelle dans la compagnie qui succédait à la troupe initiale d’amateurs. Déçu de mon refus, il se fâcha et je n’ai plus eu de ses nouvelles.
En 1956, alors que je m’étais éloignée de la troupe, il y eu une reposition de la pièce, et chose curieuse, c’est Dalila ROCHA qui interpréta ARTEMISIA.
ARTEMISIA et l’ENCENADOR Natércia PIMENTEL et Vasco de LIMA COUTO
Dessins de la main de Antonio PEDRO
ARTEMISIA et HEMON 18 et 19 février 1954 (Natércia PIMENTEL et Baptista FERNANDES)
Corps dirigeants du CCT et du TEP
Les échanges que j’ai eus avec Manoel de OLIVEIRA ne furent pas aussi réguliers que ceux que j’ai eus avec Antònio PEDRO.
On se croisait et on discutait au Ciné-Club de PORTO, j’ai su qu’il suivait mes débuts au théatre, qu’il avait projeté à un moment, avec deux architectes amis, Arménio LOSA et Màrio BONITO et un médecin Carlos BARROSO, d’organiser des matinées de poésie, en parallèle avec le Ciné Club. J’y participerais comme « diseuse ». Le projet a vite avorté. C’est à ce moment là que Màrio BONITO m’avait dit que Manoel de OLIVEIRA pensait à « quelque chose » pour moi, c’est à dire un film.
Le Cineclub de PORTO, animé comme le TEP par des personnalités de l’Opposition, par beaucoup de professeurs et élèves de l’Ecole des Beaux-Arts, nous apportait le dimanche matin une bouffée d’air frais. Après la projection des films, s’engageaient des échanges très enrichissants du point de vue culturel, mais toujours dangereux, par la présence d’informateurs de la PIDE. On savait que dans la salle, les « Grandes Oreilles » faisaient leur moisson de ragots empoisonnés.
Le public en général ne voyait en Manoel de OLIVEIRA qu’un riche industriel se payant des fantaisies : des films dans les années 30 et 40, la course automobile, des concours de gymnastique… On ignorait qu’il avait comme pas mal d’autres qui nous côtoyaient, soit au Cinéclub, soit au TEP, passé quelque temps dans les geôles de la PIDE.
Depuis plus de dix ans on l’empêchait de tourner.
Je l’ai croisé dans la rue un jour, lui sortant, moi entrant, à la Grande Poste de PORTO, Praça da Batalha.
Nous avons bavardé un moment, mais comme je rêvais de connaître son projet de film, je me suis sentie toute troublée. Et, chose incroyable, mon trouble l’a, peut-être, troublé aussi.
Manoel de OLIVEIRA, timide devant moi ! J’ai passé les heures suivantes à me demander si j’étais assez bien coiffée, si le petit ensemble de flanelle grise, avec une étroite ceinture en cuir noir et le foulard de soie dans l’encolure me flattaient… ou pas, si je n’avais pas dit trop de sottises…
Ah, Narcisse, quand tu nous tiens !
En tout cas il n’a pas été question de film pour moi.
J’ai su par mon premier mari, qu’OLIVEIRA m’avait vue et appréciée dans le rôle d’ARTEMISIA. A ce moment-là il filmait « LE PEINTRE ET LA VILLE » , et mon mari, Alfredo PIMENTEL, était son ingénieur du son.
Ce film signa le retour de OLIVEIRA à la mise-en-scène. C’était un moyen métrage, très esthétisant, un peu dans l’esprit « road ».
Quand le film fut fini et la première programmée à Lisbonne, nous fumes invités à les accompagner, lui et son épouse. La soirée s’annonçait magnifique, nous avions un « camarote » juste en face de l’écran.
Je ne me souviens pas dans quel cinéma la première eut lieu. Mais le reste de la soirée est resté gravé pour toujours dans ma mémoire. La première partie projetée, l’entracte arriva et là … catastrophe ! Quelqu’un s’avance devant le rideau et annonce que les chars russes viennent d’investir BUDAPEST.
Nous étions le 4 novembre 1956, et la 3ème guerre mondiale pouvait partir de là.
Il est évident que la projection du film se fit dans un brouhaha incroyable, que les gens sortaient, l’écran était peu regardé. Nous quatre n’avons pas pu échanger un mot. Et comme le retour à PORTO était prévu séparément, nous nous sommes quittés à l’Hotel.
A partir de 1957, je vivais une partie de l’année en France, très peu à PORTO, et de ce fait je n’ai plus jamais croisé Manoel de OLIVEIRA.
A Paris, dans les salles d’Art et Essai, au Latina, et même ici dans les Landes, à CONTIS, j’ai vu pratiquement toute son oeuvre.
C’est une oeuvre qui me parle, un « cante hondo », qui me ramène au Portugal et à cette « raia » du Minho, qui parlait aussi aux deux artistes. Matérialisée par ce fleuve-frontière, la raia ne nous sépare pas, elle nous relie plutôt, à la Galice.
Un des derniers filmes de Manoel de OLIVEIRA qui fut, d’ailleurs, le dernier pour Marcelo MASTROIANI, « Voyage au début du monde », est en fait une promenade à contre-courant, une recherche du Temps au long de la marge « minhota » (portugaise) du Minho, la marge gauche, remontant de l’embouchure en face de LA GUARDIA jusqu’aux rudes villages de montagne de CASTRO LABOREIRO, Melgaço.
Je sais à présent par la recherche généalogique que des milliers de « branches familiales » me lient à chaque petit hameau du MINHO ou de la GALICE du sud, Pontevedra ou Orense.
Manoel de OLIVEIRA aussi.
Et Antonio PEDRO ?
P.S. du 6-04-2017
Ayant cherché récemment sur internet des détails sur le travail de recherche universitaire dont « l’ANTIGONE » d’Antonio PEDRO fait toujours l’objet, j’ ai eu la désagréable surprise de voir que des données incorrectes circulent encore à propos des premières représentations, celles de 1954 et 1955.
Le rôle d’ARTEMISIA, en 1954, fut créé par moi. Pendant l’année 1955, lors de représentations en province, j’ai été l’interprète d’ARTEMISIA.
En 1956, après mon départ vers la France, lors d’une reprise de la pièce, Dalila ROCHA interpréta ARTEMISIA.
P O R T U G U E S
Manoel de OLIVEIRA
O falecimento recente do Manoel de OLIVEIRA trouxe-me tantas e tantas recordações, que se impôs a mim a obrigação de evocar duas das pessoas mais interessantes, mais criativas, que a vida me permitiu de aproximar.
Embora não haja relação nenhuma de parentesco entre eles e eu, este BLOG, destinado à parentela no sentido mais largo, mostrar-se-à adquado à confissão.
Nos anos 1953, 54, 55 e 56, no PORTO, tive a felicidade de bem conhecer o Antònio PEDRO e o Manoel de OLIVEIRA.
A convivência com os dois, provou-me mais uma vez quanto os « grandes Homens », dos quais os Artistas incarnam para mim a quintessence, são duma simplicidade e no caso de ambos, duma gentileza, que é de surpreender.
Para ajudar a bem os situar, basta dizer que o Manoel de OLIVEIRA, nascido em 1908, é considerado pelos historiadores do Cinema como o iniciador do néo-realismo, com o filme « ANIKI-BOBO », saìdo em 1942.
Os italianos, com « ROMA, Cidade Aberta », do ROSSELLINI, vieram mais tarde, em 1945
Quanto à obra do Antònio PEDRO, nascido em 1909, essa é multiforme : pintura, ceràmica, jornalismo, literatura, teatro.
O Acaso fê-los condiscìpulos nos Jesuìtas, em LA GUARDIA, Galiza, ESPANHA.
Porquê na Galiza ? Porque em 1910, a Repùblica Portuguesa tinha expulsado todas as ordens religiosas, tradicionalmente encarregadas da instrução e educação da juventude.
A minha pròpria Mãe, nascida em 1906, foi educada pelas Franciscanas de TUY, na Galiza também.
Quando eu o conheci, o Antònio PEDRO tinha jà viajado muito, vivido anos em Paris e em Londres.
Durante a estadia em Paris, frequentou os cìrculos surrealistas e em 1934, encontràmo-lo em excelente companhia na Història da Arte, pois là o vemos com outros a assinar o « Manifesto Dimensionista ». Eis alguns dos co-assinantes : Alexander CALDER, Joan MIRO, Antònio PEDRO, Hans ARP , Robert e Sònia DELAUNAY, Marcel DUCHAMP, Wassily KANDINSKY et Francis PICABIA, com quem ficou sempre muito ligado.
Em Londres, durante os anos de Guerra, foi « speaker » na B.B.C.
De regresso a Lisboa, no fim da Guerra, participa e organisa duas exposições Surrealistas, em 1947 e em 1949.
Mas, a sua paixão pelo teatro, sempre viva, leva-o a criar ume troupe. A sua grande cultura tornava-o muito exigente na escolha dos textos. O Teatro de Boulevard não lhe convinha.
Mas o microcosmo cultural liboeta não estava ainda maduro para receber PIRANDELLO ou BRECHT. No Teatro Nacional D. Maria II, o equivalente da Comédie Française, sò havia entrada para o teatro ultra clàssico.
No entanto lembro-me por volta de 1942, de duas ou três soirées seguidas, em que os meus Tios tinham assistido a um acontecimento teatral muito falado. Tratava-se da peça d’Eugène O’NEILL « Mourning becomes Electra ». Eu tinha sò doze anos e não pude acompanhà-los.
Mas o teatro social, esse, estava totalmente proìbido.
E a PIDE, a polìcia polìtica de Salazar, pela Censura, os boatos, os obstàculos administrativos, o medo difuso,
contribuìa às dificuldades. Completamente desencorajado, PEDRO retira-se para Moledo, pequena praia do norte, situada quase em frente de LA GUARDIA. Vai tratar sò de ceràmica. Como criativo que ele é, escreve, escreve sempre. Dona Manuela, a sua adoràvel esposa protege a intimidade do casal, afastando os indesejàveis.
Foi a MOLEDO que o grande poeta Eugénio de ANDRADE, que o conhecia, e o advogado Alexandre BABO, reputado adversàrio do fascismo, vieram pedir-lhe para aceitar a direcção artìstica do T.E.P.
O Teatro Experimental do Porto ( T.E.P.), emanação do Cìrculo de Cultura Teatral, trabalhava sobre um projecto cultural exactamente equivalente àquele que tinha abortado em Lisboa.
Ele hesitou muito, variou nas respostas, mas a tentação era tão forte e o entusiasmo do grupinho de que eu fazia parte, sob o nome de Natércia PIMENTEL, era tão grande, que ele acabou por ceder. Reuniamo-nos todas as semanas, numa sala posta à nossa disposição por um editor. Leituras, exercìcios de respiração e de posição da voz, expressões corporais, poesias, todas as teorias de Stanislawsky eram postas em pràtica.
O dia 18 de Junho 1953, no teatro SA da BANDEIRA, foi o nosso dia de glòria. Fizemos um triunfo O PORTO, cidade històricamente levada à contestação da ordem estabelecida, pelas armas se necessàrio, esperava com curiosidade. Esta troupe d’amadores principalmente composta de gente da oposição polìtica, de intelectuais, de artistas passados pela prisão para uns três ou quatro de entre eles, atrevia-se a apresentar três peças curtas, « A gota de mel » do Leon CHANCEREL, « A Nau Catrineta » do poeta E. Gonçalves, e « Um pedido de casamento » d’ A. Tchekov. Eu aparecia como a segunda Menina na « Nau Catrineta », e que trabalho dei às costureiras para disfarçar uma gravidez de cinco meses !
O espectàculo tinha passado sob as « fourches caudines » da PIDE, o que não foi o caso da « Mère Courage », traduzida do alemão pela nossa amiga Ilse LOSA, e que foi imediatamente proìbida. Mas o PORTO esperava mais forte, esperava a subversão pelo teatro e o Antònio PEDRO queria dar um grande golpe. Pelo Teatro, o PORTO queria rebelar-se, resistir a esse regime fascista com as unhas jà gastas, mas capazes ainda de fazer tanto mal e de ferir. Fazendo apelo a toda a sua capacidade de criação, à sua arte da metàfora, da ironia fina, ele atacou-se à tragédia das tragédias, à « ANTIGONA » de Sofocles. Tirou dela uma glosa, fora do tempo pode dizer-se, onde personagens inventados por ele nos faziam passar da Grécia antiga ao mundo contemporâneo.
Programme Antigona
Programme « ANTIGONA »
Programme « Teatro SA da Bandeira »
No INTERNET, basta pedir « Antònio PEDRO », « A glosa d’Antònio PEDRO sobre a ANTIGONA », « Antònio PEDRO e o TEP », e tantos outros, para constatar que o seu trabalho continua a alimentar a reflexão.
Sessenta anos mais tarde, hà universitàrios, hà exegetas que trabalham ainda sobre a sua glosa.
O seu caràcter de resistência, d’oposição à ordem injusta interroga-nos sempre.
E porque « ainda està fecundo o ventre de onde surgiu a coisa imunda ».
Que ele seja soft ou hard, sò quando se viveu sob um fascismo, se pode compreender esta necessidade nunca satisfeita de revisitar o passado, para o questionar e tirar lições para o futuro
O papel do ENCENADOR, escrito para ele mesmo, Antònio PEDRO, e finalmente interpretado pelo poeta Vasco de LIMA COUTO e o papel de ARTEMISIA, que me foi atribuido, não existem na tragédia de Sòfocles.
O Antònio PEDRO escreveu para mim esse papel da ARTEMISIA, criadinha espevitada, e repondeu-me ele um dia, « simbolo da beleza eterna e intemporal » e da « juventude que pode ousar tudo ». Felizmente essa resposta não me subiu à cabeça. Pela invenção desses dois personagens, o Antònio PEDRO confere à obra, atravès da ironia, dos « lieux-communs », ou das brincadeiras ousadas, uma intemporalidade, que deixa passar uma mensagem politica transparente.
Os três VELHOS representam o Côro Antigo.
O segundo VELHO tinha poucas palavras para dizer, mas elas deviam soar duma maneira estranha aos ouvidos das « Grandes Oreilles ». O interprete desse 2° VELHO era o advogado Alexandre BABO, defensor habitual dos presos polìticos. O Alexandre e eu viviamos nessa época uma violenta paixão amorosa. Uma paixão que contribuiu entre outros elementos à minha partida para a França.
CREON foi interpretado pelo João GUEDES, desaparecido cedo demais, e considerado, assim como a Dalila ROCHA nos anos seguintes, como dois grandes actores.
Que emoção quando me recordo desse 18 de Fevereiro 1954 ! No dia seguinte ia festejar os meus 24 anos. Nos todos, a troupe, tinhamos bem consciência de participar a algo de « grande », mas não tanto assim.
Foi històrico !
A ùltima cena da ARTEMISIA, testemunha e actuante na tragédia, recuando terrorisada, depois, de constatar que HEMON tinha preferido acompanhar a noiva, ANTIGONA, na morte, deixou-me com uma interrogação para sempre sem resposta…
Vou recuando, apavorada, as mãos cobertas do sangue deixado pelo punhal de HEMON, as minhas proprias mãos terrorisam-me, o pùblico faz-me uma ovação memoràvel, vou até aos bastidores… e ali, antes de retomar contacto com a realidade, ainda num estado de quasi transe, o Antonio PEDRO ou o Alexandre BABO ( qual dos dois ?) toma-me as mãos e beija-as longa, longamente…
O papel da ANTIGONA foi atribuido à Dalila ROCHA. Ela, uma mulher adulta, de mais de trinta anos, era uma ACTRIZ de verdade. Uma mulher para quem a vida era o TEATRO.
Fez carreira em LISBOA, e ingressou no Teatro Nacional D. Maria II.
Eu fui sòmente uma juventude em busca de aplausos sobre um palco. A minha verdadeira vida estava algures.
No entanto o Antònio PEDRO pensava que eu era capaz de « grandes coisas » e perseguiu-me quase, quando resolvi vir viver em FRANCA. Por visitas feitas aos meus Pais, em Monção, por cartas durante meses, quase dois anos, tentou convencer-me de entrar como actriz na Companhia Profissional que sucedeu à troupe de amadores. Ofendido pela minha recusa, zangou-se e não me deu mais notìcias.
Em 1956, quando eu jà não frequentava a troupe, houve ume reposição e, coisa curiosa, foi à Dalila ROCHA que PEDRO confiou o papel de ARTEMISIA.
Manoel de Oliveira
Natércia PIMENTEL (Artemisia) e Vasco de LIMA COUTO ( Encenador)
Os contactos que tive com o Manoel de OLIVEIRA não foram tão regulares como os que tive com o Antònio PEDRO.
Cruzàvamos-nos e discutiamos no Ciné-Club do PORTO. Eu soube que ele tinha seguido os meus « débuts » teatrais, que ele tinha projectado em certa altura, com dois arquitectos amigos, LOSA e Mario BONITO e um médico Carlos BARROSO, organisar matinées de poésia, em paralelo com o Ciné Club. Eu participaria como « diseuse ». O projecto caiu à àgua pouco tempo depois. Foi nessa ocasião que o Màrio BONITO me disse que o Manoel de OLIVEIRA pensava em « qualquer coisa », quere dizer um filme, para mim.
O Ciné Club do PORTO, como o TEP, animado por personalidades da Oposição, por vàrios professores e alunos da Escola de Belas-Artes, trazia-nos todos os Domingos de manhã, um sopro de ar fresco.
Depois da projecção dos filmes, havia as discussões ricas do ponto de vista cultural, mas sempre perigosas, pela presença dos informadores da PIDE.
Sabiamos que na sala, as « Grandes Oreilles » faziam a colheita de informações envenenadas.
O pùblico de uma maneira geral via no Manoel de OLIVEIRA um industrial rico, que podia permitir-se fantasias : cinema nos anos 30 e 40, a corrida automòvel, concursos de gymnàstica…O que o pùblico ignorava é que, como alguns outros que frequentavam o Ciné Club ou o TEP, ele tinha passado uns tempos nos calabouços da PIDE. Havia mais de dez anos que as Autoridades o impediam de filmar.
Encontrei-me com ele na rua, um dia, saia ele e entrava eu nos Correios, na Praça da Batalha
Como eu ansiava de conhecer o « tal projecto de filme », fiquei toda intimidada. E, coisa incrìvel, a minha timidez, deve tê-lo perturbado.
O Manoel de OLIVEIRA, tìmido deante de mim ! Passei as horas seguintes a interrogar-me para saber se estava bem penteada, se o conjunto de flanela cinzenta, com o cinto estreitinho em couro preto e se o foulard de seda no pescoço, me embeleciam …ou não.
Ah Narciso, quando nos tens !
Seja como fôr, nada de filme para mim.
Pelo meu primeiro marido, soube que OLIVEIRA tinha apreciado favoràvelmente o meu papel d’ARTEMISIA. Nessa altura andava ele a filmar « O Pintor e a Cidade », e o meu marido, Alfredo PIMENTEL, era o seu engenheiro do son.
Esse filme marcava o regresso de OLIVEIRA à mise-en-scène. Era um moyen métrage, muito estétisante, um pouco do género « road », como ele fez outros. Quando o filme estava acabado, uma première foi programada em Lisboa e nòs fomos convidados a acompanhà-los, ele e a sua esposa, Maria Isabel.
A soirée prometia ser magnìfica, estavamos instalados num camarote face au palco. Não me lembro em que cinema foi dada a première. Mas o resto da soirée ficou gravado nìtidamente na minha memòria. Passada a primeira parte, chega o intervalo…e ali, catàstrofe ! Um homem avança no proscénio e anuncia que os tanques russos acabavam de entrar em BUDAPEST.
Estavamos no dia 4 de Novembro 1956, e a terceira guerra mundial podia sobrevir.
E evidente que a projecção continuou num brouhaha insdiscrìptivel, que os espectadores saìam e o écran ficava ignorado. Nòs os quatro não trocamos uma ùnica palavra. E, como o regresso ao PORTO estava combinado fazer-se separadamente, despedimo-nos no Hotel.
A partir de 1957, eu vivia uma parte do ano em França, muito pouco no PORTO, e por isso não voltei a encontrar o Manoel de OLIVEIRA.
Em PARIS, nas salas de Art et Essai, no LATINA, e mesmo aqui nas Landes, em CONTIS, vi pràticamente todos os seus filmes.
E uma obra que me « fala », um « cante hondo », que me leva até Portugal, até essa raia do Minho, que « falava » também aos dois artistas. Materialisada por esse rio-fronteira, essa raia não sò não nos separa, mas antes nos reune com a Galiza.
Um dos ùltimos filmes do Manoel de OLIVEIRA, que acontece ser o ùltimo do Marcelo MASTROIANI, « Viagem ao principio do Mundo », é na realidade um passeio a contra-corrente, uma « Recherche du Temps » ao longo da margem minhota (portuguesa) do rio, a margem esquerda, progredindo da foz em frente de LA GUARDIA até às agrestes aldeias da serra de CASTRO LABOREIRO, Melgaço.
Eu sei desde hà pouco tempo, pela pesquisa genealògica, que, por milhares de ramos estou ligada a cada aldeia, a cada lugarzinho do MINHO ou da GALIZA do sul, Pontevedra ou Orense.
O Manoel de OLIVEIRA também.
E o Antònio PEDRO ?